3. Les lois du mouvement de Newton

Dans le chapitre précédent, nous avons étudié les propriétés des mouvements indépendamment de leur origine. Nous allons maintenant établir le lien entre les forces qui agissent sur un point matériel et le mouvement qui en résulte. Nous présentons d’abord les lois de Newton qui régissent les trajectoires d’un point matériel. Nous appliquons ensuite ces principes à l’étude de la chute libre.

Mouvement d’un point matériel

Définitions

L’étude générale d’un mouvement est une question complexe : outre le déplacement de son centre de gravité, le système peut tourner sur lui-même ou encore se déformer. Le point de vue de la mécanique du point consiste à adopter la modélisation mathématique la plus simple possible en assimilant le système à un point géométrique. On définit un point matériel \(M\) par :

  • son vecteur position \(\vec{r}=\overrightarrow{OM}\), dont découlent le vecteur vitesse \(\vec{v}= \text{d}\vec{r}/ \text{d}t\) ainsi que le vecteur accélération \(\vec{a}= d \vec{v} / \text{d}t\).

  • sa masse \(m\), dont l’unité est le kilogramme (kg).

En règle générale, on peut réduire un système à un point matériel si ses dimensions sont petites par rapport aux échelles caractéristiques du mouvement étudié. Considérons par exemple le mouvement de révolution de la Terre autour du Soleil. Le rayon de la Terre est d’environ \(6.4\times 10^3\) km, alors que la distance Terre-Soleil vaut approximativement \(1.5\times 10^8\) km. Il est donc possible de réduire la Terre à un point matériel de masse \(m_T\approx 6\times 10^{24}\) kg.

La masse inerte

La masse \(m\) du point matériel est aussi appelée masse inerte. L’expérience montre en effet qu’il est plus difficile de communiquer une vitesse donnée à une balle de golf qu’à une balle de ping-pong. Il est aussi plus difficile de l’arrêter une fois qu’elle est lancée. On appelle inertie la résistance que présente un corps à toute modification de sa vitesse. Plus la masse du corps est importante, plus il aura tendance à conserver sa vitesse, et plus il sera difficile de modifier sa vitesse..

Forces élémentaires et forces de contact

Une force est une action physique capable de produire ou de modifier le mouvement d’un point matériel. Elle est spécifiée par un vecteur qui est généralement noté \(\vec{F}\). Une force est définie par sa direction, son sens et son intensité \(F=\Vert \vec{F} \Vert\). L’unité de force est le newton : \(1~\text{N}= 1~\text{kg}\cdot \text{m} \cdot \text{s}^{-2}\).

Au niveau fondamental, on ne connaît que 4 forces (ou interaction) élémentaires :

  • l’interaction gravitationnelle est responsable de l’attraction des corps massifs sous l’effet de leur masse. Cette force à longue portée est toujours attractive. Elle se manifeste par l’attraction terrestre et les phénomènes de marée, et gouverne les orbites des planètes. Plus généralement, elle est impliquée dans la structure à grande échelle de l’univers.

  • l’interaction électromagnétique décrit les forces entre charges électriques. Elle est impliquée dans de nombreux phénomènes du quotidien (ondes lumineuses, électricité, magnétisme) et est responsable de la structure des atomes. Elle peut être attractive ou répulsive: par exemple, deux pôles d’aimants de même signe («nord» ou «sud») vont se repousser alors que deux pôles d’aimants de signe opposé vont s’attirer.

  • l’interaction faible est responsable de la désintégrations de certaines particules subatomiques (radioactivité \(\beta\)). Elle est également à l’origine des phénomènes de fusion nucléaire et de nucléosynthèse au cœur les étoiles.

  • l’interaction forte est impliquée dans le cohésion des noyaux atomiques. Elle lie les protons et les neutrons entre eux. C’est la plus intense des forces fondamentales.

Les interactions faibles et fortes sont toutes deux à très courte portée (au plus \(10^{-15}\) m) : elles sont donc pertinentes en physique subatomique. L’interaction électromagnétique est dominante aux échelles microscopiques, alors que la force qui prédomine aux très grandes échelles est l’interaction gravitationnelle.

Néanmoins, l’expérience montre qu’il est nécessaire d’introduire des forces supplémentaires pour décrire de nombreux phénomènes physiques de la vie quotidienne. En effet, les interactions (d’origine électromagnétiques) entre atomes et molécules se manifestent au niveau macroscopique par des forces de frottement (avec le fluide environnant ou entre solides) ou des forces de réaction (qui nous empêchent de passer à travers le sol par exemple). Bien que ces forces de contact dérivent des interactions fondamentales (en tenant compte d’effets quantiques ou relativistes, le cas échéant), elles ne sont pas considérées comme telles.

La force de pesanteur

En pratique, les forces que nous allons étudier dans ce cours se diviseront en deux catégories : les forces à distance (force de gravitation, force électromagnétique) et les forces de contact (forces de frottement, de réaction). Dans ce chapitre, nous serons encore plus restrictif en considérant uniquement la force de pesanteur. On définit le poids \(\vec{P}\):

()\[\vec{P} = m \vec{g} \ ,\]

\(\vec{g}\) est le champ de pesanteur, de direction verticale, orienté vers le bas.

Avertissement

Le poids étant une force, il se mesure en newton et non pas en kg ! Dans le langage courant, on assimile souvent le poids à la masse et on l’exprime de manière erronée en kilogrammes.

Dans le référentiel du quotidien qu’est la surface de la Terre, la force d’attraction exercée par la Terre est (plus ou moins) constante et par abus de langage, le mot «poids» est utilisé comme synonyme de la masse.

C’est un exemple important où le langage courant et le vocabulaire scientifique sont en conflit.

Alors que le poids d’un corps dépend des masses qui exercent une attraction sur ce corps (par exemple le poids change selon que l’on se trouve à la surface d’une planète plus ou moins massive), sa masse n’en dépend pas.

Masse et poids

Un astronaute de masse 70kg a un poids de 686N sur Terre et de 114N sur la Lune.

Nous verrons au Chapitre 5 que la force de pesanteur est une manifestation locale de l’interaction gravitationnelle. Elle dépend donc des propriétés du corps attracteur. À la surface de la Terre, l’intensité moyenne \(g = \Vert \vec{g} \Vert\) du champ de pesanteur vaut :

\[g \approx 9.81~\text{m}\cdot\text{s}^{-2} \ .\]

La masse grave

La masse grave (parfois appelée masse gravitationnelle ou masse pesante) est une mesure de la quantité de matière présente dans un objet.

Tous les objets macroscopiques qui nous entourent possèdent une masse gravitationnelle: les êtres vivants, les matériaux, les planètes, les galaxies, etc… À l’échelle des particules élémentaires, ce n’est pas le cas et certaines particules ne possèdent pas de masse gravitationnelle.

Dans le Système International, l’unité de la masse est le kilogramme (kg). Le tab-masses donnent les masses (ou l’ordre de grandeur) de quelques objets typiques allant des particules sub-atomiques au grandes structures de l’Univers.

Masses d’objets typiques

Objet

Masse (kg)

Électron

\(9\times10^{-31}\)

Proton

\(2\times10^{-27}\)

Atome d’oxygène

\(3\times10^{-26}\)

Molécule d’insuline

\(10^{-23}\)

Amibe géante

\(10^{-8}\)

Fourmi

\(10^{-5}\)

Être humain

\(10^{2}\)

Baleine bleue

\(10^{5}\)

Terre

\(6\times10^{24}\)

Soleil

\(2\times10^{30}\)

Voix Lactée

\(10^{41}\)

Principe d’équivalence

Il n’y a a priori aucune raison fondamentale imposant que masse inerte et masse grave soient identiques, puisqu’elles sont définies de manière indépendante. C’est le principe d’équivalence énoncé par Einstein dans le cadre de la théorie de la relativité générale (1915) qui stipule que la masse inertielle et la masse gravitationnelle sont proportionnelles quel que soit le corps.

Avec un choix d’unités judicieux on donc peut facilement obtenir leur égalité, et on écrit souvent que le principe d’équivalence énonce l’égalité entre masse inertielle et masse gravitationnelle. Dans la suite de ce cours nous parlerons donc de masse, sans préciser s’il s’agit de la masse gravitationnelle ou inertielle.

Note

Ce principe, comme tous les principes de la Physique, est un constat expérimental, jamais démenti mais inexpliqué. De nombreuses expériences ont testé cette égalité, réduisant toujours plus l’écart possible entre ces deux masses. La dernière en date a été menée e 2016 par le Centre National d’Études Spatiales avec le satellite MICROSCOPE et a demontré que la différence, si elle existe, doit être plus petite que \(2\times10^{-15}\).

La satellite MICROSCOPE

Le satellite MICROSCOPE (Crédit: CNES)

Quizz

--- locale: 'fr' --- ## Quelle force fondamentale explique le mouvement des planètes? > dépend de leur masse - [ ] La force électromagnétique - [x] La force de gravitation - [ ] l'interaction faible - [ ] l'interaction forte ## Quelle phrase est correcte? > Le poids est une force - [ ] Son poids est de 70kg - [x] Sa masse est de 70 kg ## Quelle est la force d'attraction gravitationnelle (=le poids) à la surface de la Terre pour une personne de 90kg? > On rappelle que *g*=9.81 m s⁻². - [ ] 783.4 N - [x] 882.9 N - [ ] 90 N - [ ] 9.17 N ## Une personne subit une force d'attraction gravitationnelle de 687N à la surface de la Terre. Quelle est sa masse? > On rappelle que *g*=9.81 m s⁻². - [ ] 90 kg - [ ] 687 kg - [x] 70 kg - [ ] 6739.5 kg ## Une personne de 75kg subit une force d'attraction gravitationnelle de 127.5N à la surface de la Lune. Combien vaut l'accélération de la pesanteur sur la Lune? > P = m × g - [ ] 9562.5 m s⁻² - [ ] 9.81 m s⁻² - [x] 1.7 m s⁻² ## Quelle phrase est correcte? > La masse est une quantité de matière - [x] Une masse de 1kg sur la Terre possède une masse de 1kg sur la Lune - [ ] Une masse de 1kg sur la Terre possède une masse de 0.17kg sur la Lune

Les lois de la dynamique

En 1687, Newton formule un ensemble de trois lois fondamentales qui constituent encore aujourd’hui les bases de la mécanique classique. Ses travaux marquent un tournant décisif dans l’histoire des sciences en proposant une description mathématique de la physique.

Première loi de Newton

En mécanique du point, un système est dit isolé s’il n’est soumis à aucune force extérieure [1]. En pratique, cette définition a peu de sens car il est difficile — voire impossible — de soustraire un système de toute influence externe. On introduit alors la notion de système pseudo-isolé lorsque la résultante des forces qui lui sont appliquées est nulle. La première loi de Newton, ou principe d’inertie, s’énonce alors de la manière suivante :

1.1 Principe d’inertie

Il existe une famille de référentiels, appelés référentiels galiléens, tels que, par rapport à l’un de ces référentiels, tout système isolé ou pseudo-isolé est soit au repos, soit animé d’un mouvement rectiligne uniforme.

Le principe d’inertie peut encore s’exprimer sous la forme mathématique suivante :

()\[\boxed{\sum \vec{F}_{\textrm{ext}} = \vec{0} \qquad \Leftrightarrow \qquad \vec{v}(t) = \vec{v}_0 \ .}\]

\(\vec{v}_0\) est un vecteur constant. Notons que la situation où le système est au repos correspond au cas particulier \(\vec{v}_0 = \vec{0}\).

Le principe d’inertie fait appel à la notion de référentiel, que l’on définit comme un ensemble de points fixes par rapport auxquels on repère une position ou un mouvement. Considérons par exemple un train qui se déplace selon un mouvement rectiligne uniforme. Le principe d’inertie s’applique aussi bien pour un observateur à l’intérieur du train (qui est lié au référentiel en translation uniforme) que pour un observateur extérieur (qui est lié au référentiel fixe des rails par exemple). Par contre, si le train freine ou suit une trajectoire courbe, l’observateur à l’intérieur du train ressent des forces d’inertie. Dans ce cas, la première loi de Newton ne s’applique plus.

Le principe d’inertie s’identifie alors à une définition empirique d’un référentiel galiléen. Parmi les référentiels galiléens que nous rencontrerons, on peut citer :

  • le référentiel de Copernic (ou héliocentrique), qui a pour origine le centre du Soleil et dont les axes sont définis par trois étoiles suffisamment éloignées pour pouvoir être considérées comme fixes. Il permet d’étudier le mouvement des planètes.

  • le référentiel géocentrique, qui a pour origine le centre de masse de la Terre et dont les axes sont parallèles à ceux du référentiel de Copernic. Il sert, par exemple, à l’étude du mouvement des satellites artificiels.

  • le référentiel terrestre, qui a pour origine un point de la Terre et dont les axes ont des directions fixes (par exemple : le repère défini par trois arêtes d’une salle de classe).

Le caractère inertiel d’un référentiel reste toujours approximatif. En effet, la Terre tournant sur elle-même, le référentiel terrestre n’est pas parfaitement galiléen. De la même façon, la Terre tourne autour du Soleil, ce dernier tournant autour du centre de la Voie Lactée. Il en résulte que ni le référentiel géocentrique, ni le référentiel héliocentrique ne sont parfaitement galiléens.

En pratique, nous n’aborderons dans ce cours que des situations où le principe d’inertie est vérifié. Il sera donc toujours sous-entendu que le référentiel d’étude est galiléen.

Deuxième loi de Newton

La deuxième loi de Newton, ou principe fondamental de la dynamique, s’énonce ainsi :

1.2 Principe fondamental de la dynamique.

Dans un référentiel galiléen, la somme des forces extérieures appliquées au système est égale au produit de sa masse et de son accélération.

Mathématiquement, le principe fondamental de la dynamique s’exprime également sous la forme :

()\[\boxed{\sum \vec{F}_{\textrm{ext}} = m \vec{a} \ .}\]

L’accélération étant égale à la dérivée seconde de la position par rapport au temps, l’égalité () constitue donc une équation différentielle.

Il est intéressant de noter que l’on retrouve le principe d’inertie si le système est (pseudo-)isolé :

()\[\sum \vec{F}_{\textrm{ext}}=\vec{0} \quad \Rightarrow \quad \vec a =\frac{\text{d}\vec{v}}{\text{d}t}=\vec{0} \quad \Rightarrow \quad \vec{v}(t) = \vec{v}_0\]

avec \(\vec{v}_0\) est un vecteur constant. Pour autant, le principe d’inertie () ne doit pas être considéré comme un cas particulier de l’équation (). En effet, le principe d’inertie est un préalable permettant d’identifier, de manière opérationnelle, les référentiels galiléens dans lesquels le principe fondamental de la dynamique peut ensuite être appliqué.

Si le principe d’inertie énonce qu’aucune force extérieure n’est requise pour entretenir un mouvement rectiligne uniforme, l’action de forces extérieures est nécessaire pour modifier le vecteur vitesse (en norme et en direction). Précisons également que la deuxième loi de Newton peut être généralisée pour décrire des objets dont la masse varie au cours du temps (comme par exemple une fusée au décollage). Si l’on définit la quantité de mouvement \(\vec{p} = m \vec{v}\), le principe fondamental de la dynamique prend alors la forme équivalente :

\[\sum \vec{F}_{\textrm{ext}} = \frac{\text{d}\vec{p}}{\ d t} \ .\]

Troisième loi de Newton

La troisième loi de Newton est également appelée principe des actions réciproques :

1.3 Principe des actions réciproques.

Si un corps \(A\) exerce une force sur un corps \(B\) , il subit en retour une force d’intensité égale, de même direction mais de sens opposé.

Notons \(\vec{F}_{A/B}\) la force qu’exerce le corps \(A\) sur le corps \(B\). En termes mathématiques, on a donc :

\[\boxed{\vec{F}_{B/A} = - \vec{F}_{A/B} \ . }\]

Ce principe implique en particulier que les deux forces sont portées par la droite qui relie les points \(A\) et \(B\) — voir fig-acreac. Newton a fait appel à ce principe pour déterminer l’expression de la force de gravitation entre deux corps massifs, qui sera discutée au Chapitre 5. En pratique, cette loi est surtout invoquée lorsque l’on étudie une assemblée de points matériels en interaction.

_images/ch3_acreac.png

Action et réaction.

Rappels sur les équations différentielles

Une équation différentielle est une équation dont l’inconnue est une fonction. Elle se présente sous la forme d’une relation entre cette fonction et ses dérivées. Précisons tout de suite qu’il suffit souvent de savoir dériver pour déterminer la solution d’une équation différentielle ! On se limitera ce semestre à 2 types d’équations différentielles dont il faudra connaître la solution.

  • Les équations qui se ramènent à une primitive :

    \[\frac{d y}{d t} = f(t) \ ,\]

    \(f\) est une fonction de la variable \(t\). Dans ce cas, la solution est tout simplement la primitive de \(f\), à savoir :

    \[y(t) = F(t) \ , \quad \text{où} \quad F'(t)= f(t) \ .\]

    Exemple : l’équation \(\frac{dy}{dt}=2t\) admet comme solution \(y(t) = t^2 + C\), où \(C \in \mathbb{R}\).

  • Les équations linéaire du \(1^{\textrm{er}}\) ordre :

    \[\frac{d y}{d t} = \alpha y(t) \ ,\]

    \(\alpha\) est une constante. Cette équation se lit de la manière suivante : « On cherche une fonction \(y(t)\), telle que sa dérivée soit égale à la fonction elle-même (multiplié par une constante) ». Or il n’existe qu’une seule fonction qui vérifie cette propriété : la fonction exponentielle. La solution est donc :

    \[y(t) = Ce^{\alpha t} \ ,\]

    \(C\) est une constante.

Il est important de vérifier systématiquement le résultat en injectant la solution dans l’équation. La dernière étape pour résoudre une équation différentielle consiste à déterminer les constantes d’intégration à l’aide des conditions initiales.

Le mouvement de chute libre

Nous appliquons maintenant les lois de Newton pour caractériser le mouvement d’un point matériel soumis uniquement à son poids \(\vec{P}=m\vec{g}\). On définit pour cela le repère cartésien \(Oxyz\), l’axe vertical \((Oz)\) étant orienté vers le haut. D’après le principe fondamental de la dynamique, nous pouvons écrire : \(\vec{P} = m\vec{a}\). Il en découle que la masse disparaît de l’équation du mouvement :

()\[\vec{a} = \vec{g} \ .\]

Nous pouvons donc d’ores et déjà conclure que le mouvement de chute libre d’un point matériel est indépendant de sa masse. Ce résultat contre-intuitif n’est strictement valable que dans le vide. Dans le cas où le mouvement a lieu dans un fluide, l’air ou l’eau par exemple, l’équation () est une équation approchée qui n’est valable que lorsque les forces de frottement sont négligeables.

Dans la suite, nous déterminons les solutions de l’équation () selon que la vitesse initiale soit nulle ou non. Ceci nous permettra de mettre en place la méthodologie qui sera utilisée systématiquement en mécanique du point.

Chute libre sans vitesse initiale

On suppose tout d’abord que la particule est lâchée à l’instant \(t=0\) de l’altitude \(h\), sans vitesse initiale. Pour résoudre les équations du mouvement, on commence par projeter l’équation () sur l’axe \((Oz)\) :

\[\frac{\text{d}v_z }{\text{d}t} = -g \ .\]

Cette équation différentielle s’intègre directement et l’on obtient :

()\[v_z(t) = -gt + C \ ,\]

\(C\) est une constante d’intégration. Pour fixer sa valeur, on utilise la condition initiale à \(t=0\). L’objet étant lâché sans vitesse initiale, on a :

()\[v_z(0) = 0 \ .\]

Si l’on compare l’expression () de la vitesse évaluée à \(t=0\) avec la condition initale (), on en déduit que \(C=0\). On obtient finalement l’expression de la vitesse :

()\[\boxed{v_z(t) = -gt \ .}\]

À partir de ce résultat, nous pouvons également déterminer l’évolution de la position en fonction du temps. En effet, position et vitesse sont liées par la relation :

\[\frac{\text{d}z}{\text{d}t} = v_z(t) \ .\]

L’intégration de l’équation () donne alors :

()\[z(t) = -\frac{1}{2}gt^2 + C' \ .\]

La nouvelle constante d’intégration \(C'\) s’obtient en imposant la condition initiale sur la position :

()\[z(0) = h \ .\]

Si l’on compare l’expression () de la position évaluée à \(t=0\) avec la condition initiale (), on en déduit que \(C'=h\). Finalement, l’évolution de la position en fonction du temps est donnée par la formule :

()\[\boxed{z(t) = h -\frac{1}{2}gt^2 \ .}\]

Ce résultat est appelé l’équation horaire du mouvement.

Mouvement balistique

Nous reprenons maintenant le mouvement de chute libre dans la situation plus générale où le point matériel est lancé depuis l’origine avec une vitesse initiale \(\vec{v}_0\). On suppose que le vecteur \(\vec{v}_0\) fait un angle \(\alpha\) avec l’axe \((Ox)\), comme représenté sur la fig-ch3-parabole (a).

_images/ch3_parabole.png

Gauche: Mouvement balistique d’un point matériel dans le champ de pesanteur uniforme. Droite: Trajectoire parabolique du projectile: équation ().

Évolution de la vitesse

L’équation () étant une égalité entre vecteurs, la première étape consiste à projeter cette équation selon les trois directions de l’espace. On obtient donc trois équations différentielles :

()\[\frac{\text{d}v_x}{\text{d}t} = 0 \ , \quad \frac{\text{d}v_y}{\text{d}t} = 0 \ , \quad \text{et} \quad \frac{\text{d}v_z}{\text{d}t} = -g \ .\]

En intégrant ces équations, on obtient les composantes de la vitesse :

()\[v_x(t) = A \ , \quad v_y(t) = B \ , \quad \text{et} \quad v_z(t) = -gt + C \ ,\]

\(A\), \(B\) et \(C\) sont des constantes d’intégrations. Pour déterminer leur valeur, nous utilisons les conditions initiales qui sont fixées par l’expérience (voir la fig-ch3-parabole) :

()\[\vec{v}(0)=\vec{v}_0 \quad \Rightarrow \quad v_x(0)= v_0 \cos \alpha \ , \quad v_y(0)=0 \ , \quad v_z(0)= v_0 \sin \alpha \ .\]

En comparant les expressions des composantes de la vitesse () évaluées à \(t=0\) avec les conditions initiales (), on obtient \(A=v_0 \cos \alpha\), \(B=0\) et \(C=v_0 \sin \alpha\). La vitesse est donc donnée par :

()\[\boxed{v_x(t) = v_0 \cos \alpha \ , \quad v_y(t) = 0 \ , \quad \text{et} \quad v_z(t) = -gt + v_0 \sin \alpha \ .}\]

Équation horaire et trajectoire

Afin d’obtenir les équations horaires du mouvement, on intègre encore une fois l’équation () pour obtenir :

()\[x(t) = v_0t \cos \alpha + A' \ , \quad y(t) = B' \ , \quad \text{et} \quad z(t) = -\frac{1}{2}gt^2 + v_0t \sin \alpha + C' \ .\]

Les constantes d’intégration sont déterminées avec les conditions initiales : la masse étant lancée depuis l’origine, on a \(x(0)=y(0)=z(0)=0 \ \Rightarrow \ A'=B'=C'=0\). Finalement, les équations horaires s’écrivent :

()\[\boxed{x(t) = v_0t \cos \alpha \ , \quad y(t) = 0 \ , \quad \text{et} \quad z(t) = -\frac{1}{2}gt^2 + v_0t \sin \alpha \ .}\]

Le mouvement s’effectue donc dans le plan formé par le vecteur vitesse initiale \(\vec{v}_0\) et le vecteur champ de pesanteur \(\vec{g}\). Il correspond à la combinaison de deux mouvements rectilignes, selon les axes \((Ox)\) et \((Oz)\). La composante selon \((Ox)\) de la force étant nulle, le principe d’inertie implique que le mouvement horizontal est rectiligne uniforme. En revanche, on retrouve selon la direction \((Oz)\) le mouvement accéléré discuté au paragraphe « Chute libre sans vitesse initiale ».

Enfin, on peut déterminer l’équation de la trajectoire \(z(x)\) en éliminant le paramètre \(t\) dans les expressions () :

()\[t = \frac{x}{v_0 \cos \alpha} \quad \Rightarrow \qquad \boxed{z(x) = -\frac{g}{2v_0^2\cos^2 \alpha} x^2 + x \tan \alpha \ .}\]

La trajectoire est donc une parabole, représentée sur la fig-ch3-parabole (b).

Analogie avec l’électrostatique

La chute libre n’est pas le seul exemple de mouvement dans un champ de force constant. En effet, lorsqu’une particule de charge \(q\) est soumise à un champ électrique uniforme \(\vec{E}\), elle subit la force :

\[\vec{F}_{el} = q \vec{E} \ .\]
_images/particule_chargee.png

Particule chargée dans un champ électrique.

La force électrique peut être mise à profit pour accélérer les électrons, comme par exemple dans les tubes cathodiques des anciennes générations d’écrans ou de téléviseurs. Elle est également utilisée dans les accélérateurs de particules pour étudier la structure des noyaux atomiques et découvrir de nouvelles particules élémentaires, comme au Centre Européen pour le Recherche Nucléaire (CERN) basé à Genève — voir ch3_cern.

_images/ch3_cern.jpg

Détecteur de particule sur l’anneau du LHC (crédit photo : CERN).